Guinée
Contexte et actualités
Indépendante depuis 1958, la Guinée a connu une succession de régimes autoritaires, l’instabilité politique et la répression. En 2010, Alpha Condé devient le premier Président démocratiquement élu. Réélu en 2015, il modifiera la Constitution afin de pouvoir se représenter une troisième fois, ce qui déclenche une large opposition et entraîne tensions et manifestations. Ces dernières sont violemment réprimées, le bilan est lourd : des dizaines de personnes tuées et d’opposants arrêtés. En octobre 2020, Alpha Condé est réélu mais cette réélection est contestée et, le 5 septembre 2021, il est renversé par un coup d’Etat militaire mené par le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya.
La nouvelle crise politique aiguë que traverse la Guinée s’ajoute à de vives tensions sociales dans un contexte socio-économique difficile. Malgré ses ressources naturelles et hydrographiques (on parle du « château d’eau de l’Afrique ») et son potentiel minier sous-exploité, la Guinée occupe la 178ème place sur 189 dans l’Indice 2020 de Développement Humain du PNUD.
Les crises économiques et sociales de la fin des années 2000, l’instabilité politique jusqu’en 2013 puis l’épidémie d’Ebola (2014-2016) ont affecté durablement l’économie et les conditions de vie de la population guinéenne. 55,2% vivent en dessous du seuil de pauvreté national et de grandes disparités existent entre centres urbains et zones rurales. L’accès à l’eau potable, à des installations sanitaires et aux soins médicaux demeure un défi. L’extrême pauvreté affecte en premier lieu femmes et enfants et le chômage touche environ 40% des jeunes gens.
En 2020, la situation s’est encore aggravée avec l’apparition de la pandémie de Covid-19 et les crises qu’elle a engendrées et, début 2021, le pays a connu une deuxième épidémie d’Ebola.
Depuis mai 2022, des tensions chroniques sont observées, surtout à Conakry, en lien avec cette transition, plusieurs acteurs politiques et de la société civile étant insatisfaits par la manière dont la transition se poursuit. La situation a entraîné des manifestations et a eu des conséquences économiques et sociales. Attendus en 2024, le vote d’une nouvelle Constitution et le transfert du pouvoir à des civils élus n’ont pas eu lieu.
Sur le plan économique, la Guinée a connu une flambée des prix d’achat des denrées de première nécessité et une baisse importante du pouvoir d’achat des populations à faible revenus. Cette situation perdure depuis l’augmentation du prix du litre de carburant à la pompe suite au terrible incendie du dépôt principal de carburant de Kaloum (Conakry) au mois de décembre 2023. Cet accident industriel majeur a affecté des milliers de personnes et engendré des impacts à long terme sur les plans socio-économique, sanitaire et environnemental.
Le projet de nouvelle Constitution, rédigé par un comité d’experts, a été rendu public le 30 juin 2025. Ce texte qui doit marquer le retour à l’ordre constitutionnel sera présenté aux Guinéennes et aux Guinéens par référendum le 21 septembre 2025. Il pourrait ouvrir la voie à une candidature à la présidentielle du général Mamadi Doumbouya, actuel président de la transition. Après le référendum, une élection présidentielle doit être organisée avant la fin de l’année a annoncé la junte militaire au pouvoir par ailleurs régulièrement accusée de répression contre les libertés. L’opposition, qui réclame un retour des civils au pouvoir, a rejeté ce projet de Constitution. (Le Monde, juillet 2025)
La situation des enfants
La Convention sur les droits de l’enfant des Nations Unies a été ratifiée le 13 juillet 1990 par le gouvernement guinéen. En janvier 2013, le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies notait les efforts du pays. Le gouvernement a promulgué un Code de l’enfant (en contradiction avec le droit coutumier). Mais de manière générale, une politique globale de l’enfance n’en est qu’à ses débuts.
Les droits des enfants restent affectés par les crises socio-économiques et politiques. Bien que le pays ait ratifié des conventions internationales majeures, les efforts pour traduire ces engagements en actions concrètes demeurent insuffisants. En 2024, le pays est classé 185ᵉ sur 193 nations par l’Indice Kids Rights, témoignant de graves lacunes en termes de protection et de respect des droits de l’enfant. Violences et pratiques néfastes telles que le mariage des enfants et les mutilations génitales féminines sont toujours répandues, touchant respectivement 45% et 92% des filles et des femmes. Elles constituent des violations des droits des femmes et des enfants. (Rapport annuel 2024 de SOS Villages d’Enfants en Guinée, janvier 2025)
Côté éducation, de grands progrès restent à faire d’autant plus qu’avec la pandémie de Covid-19, la situation éducative s’est détériorée alors que le taux d’alphabétisation des 15 ans et plus était déjà sous la barre des 40% (27,7% chez les filles). Chez les 15-24 ans il était de 53,9% : 43,5% (filles) et 69,6% (garçons).
(Sources : Rapport sur le Développement humain 2020, PNUD / La situation des enfants dans le monde, Unicef, 2019 / Institut de Statistique de l’Unesco (ISU) – Guinée, 2018 / Rapport annuel 2020 de SOS Villages d’Enfants Guinée / Le Bilan du Monde – éditions 2020 & 2021)
SOS Villages d’Enfants Guinée
SOS Villages d’Enfants a démarré ses actions en Guinée dans les années 1980 à l’heure où le pays renforçait sa politique sociale en faveur des enfants. Elles se sont intensifiées alors que les guerres civiles ravageaient la Sierra Leone et le Liberia, SOS Villages d’Enfants en Guinée s’étant engagée à aider ses voisins.
Dans les années 2010, face à l’épidémie d’Ebola, SOS Villages d’Enfants en Guinée a pris des dispositions pour protéger les bénéficiaires de ses infrastructures et, début 2015, elle a lancé une aide d’urgence d’un an à Conakry, N’Zérékoré, Coyah et Forécariah suivie d’une phase de transition post-urgence (décembre 2015-mai 2016).
En 2020, face à la pandémie et à la crise du Covid-19 qui ont pesé sur les conditions de vie des communautés vulnérables, des mesures ont été prises conjointement par les quatre pays partenaires des PACOPE pour répondre aux nouveaux besoins, protéger les familles de la propagation du virus et renforcer les structures communautaires. En Guinée, des mesures ont ainsi été mises en place pour prévenir la propagation du virus, sensibiliser les communautés, distribuer des kits d’hygiène, appuyer économiquement les familles, soutenir les élèves et sensibiliser les familles à leur retour à l’école, essentiel après des mois de fermeture des écoles qui ont touché près de trois millions d’élèves.
Après avoir longtemps géré des structures éducatives (3 jardins d’enfants, 3 écoles primaires et 3 collèges), l’association a transféré à l’Etat guinéen une cinquantaine de salles de classe par le biais d’un Protocole d’Accord signé avec le Ministère de l’Enseignement Pré-Universitaire et de l’Alphabétisation dans le cadre de la réalisation de son Programme Décennal de l’Education en Guinée 2020-2029.
(Rapport Annuel 2021-2022, SOS Villages d’Enfants en Guinée).
Récemment, SOS Villages d’Enfants en Guinée a élaboré une stratégie nationale de développement 2023-2027 dans le but de fournir une prise en charge et un accompagnement de qualité aux enfants et aux jeunes vulnérables. Par ailleurs, grâce au renforcement des capacités, ses collaborateurs et collaboratrices (138 dont 55 femmes en 2024) ont été formés à la politique de sauvegarde des enfants.
Actuellement, l’association accompagne à Conakry, Kankan, Labé et N’Zérékoré des milliers d’enfants, de jeunes et d’adultes à travers notamment trois programmes de prise en charge alternative (en 2024, 178 enfants dont 71 filles concernés, 7 jeunes réintégrés dans leurs familles) qui vont vers une diversification des services offerts, des programmes spécifiques pour les jeunes (accent mis sur l’autonomisation), des actions de plaidoyer pour la protection de l’enfance et quatre Programmes d’Accompagnement des Communautés pour la Protection de l’Enfant et des Systèmes de Protection de l’Enfant (PACOPE-SPE).
Mis en place dans 53 quartiers et villages répartis dans 9 communes à Conakry (2), Kankan (2), Labé (2) et N’Zérékoré (3), ces programmes ont compté, en 2024, 835 familles bénéficiaires directes, 3.385 enfants (1.623 filles), 292 jeunes accompagnés sur le chemin de l’emploi, 53 Comités de protection de l’enfant (1.046 membres), 53 Clubs d’Enfants (899 membres) et 114 Associations Villageoises d’Epargne et de Crédit (2.836 membres).
6
Parmi les activités 2024 de SOS Villages d’Enfants en Guinée, on peut mentionner la troisième édition du « Campus Vacances » qui a permis de former 30 enfants et jeunes dont 12 filles dans les domaines du leadership, de la communication, des NTIC et de l’éducation financière. Par ailleurs, 15 jeunes ont suivi des programmes adaptés aux exigences du marché de l’emploi pour leur insertion socioprofessionnelle.
Sur le plan environnemental, dans le cadre de l’initiative « Youth Power », qui permet d’intégrer des initiatives communautaires de protection de l’enfant et de sensibilisation au changement climatique, tout en renforçant l’implication des jeunes dans la protection de leur environnement, les jeunes ont planté 200 arbres à N’Zérékoré et aménagé un espace vert de trois hectares à Kankan.
Enfin, dans le cadre du réseau international « Joining Forces » en Guinée (partenariat entre Plan international, Child Fund, Terre des Hommes et SOS Villages d’Enfants en Guinée), des actions collectives ont été définies pour améliorer la protection de l’enfance et renforcer l’accès aux services essentiels.