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Olha P. : « Rester forte pour aider les enfants et les familles »

Publié le 16.12.2022

Plus de neuf mois après le début de la guerre, la situation s’aggrave en Ukraine où l’arrivée d’un hiver extrême met à rude épreuve les conditions de vie des populations et exacerbent leurs besoins. Olha P., une des premières collaboratrices de SOS Villages d’Enfants en Ukraine, est psychologue et travaille pour le programme de renforcement familial de Kiev. Dans une interview avec des collègues SOS en octobre dernier, elle parle des besoins des enfants et des familles et de la nécessité de rester forte pour les aider.

Quelles sont vos principales tâches en tant que psychologue pour le programme de renforcement familial ?

Je dispense des conseils individuels et collectifs aux parents et aux enfants. Mes collègues et moi-même travaillons avec des familles qui vivent dans des situations difficiles, des familles déplacées internes, des familles qui ont vécu sous l’occupation, en fait, toutes les familles et tous les enfants touchés par la guerre et qui ont besoin d’aide. Pour l’heure, dans le programme de renforcement des familles de Kiev, nous travaillons avec 366 familles et 706 enfants, soit le double des bénéficiaires qu’il y a un an.

Quels sont les besoins des enfants avec lesquels vous travaillez ?

Les enfants doivent s’adapter à leur nouvelle réalité et à leur nouvel environnement. Ils ont besoin d’un soutien psychosocial afin de gérer leur anxiété. Ils ont surtout besoin d’exercices physiques et d’exercices de respiration pour se relaxer afin de réduire leur niveau de stress et faire diminuer la pression. Le changement de comportement des enfants se manifeste à travers deux réactions opposées. L’une est un état de « gel », ils se replient sur eux-mêmes et ont peu d’interactions avec leurs pairs et leurs parents. L’autre est un état d’hyperactivité, état quasi hystérique, ils ne peuvent contrôler leurs émotions, ont des sautes d’humeur, des problèmes de sommeil… Ces deux états se traduisent physiquement et pas seulement émotionnellement.

Des activités sportives sont organisées pour améliorer le bien-être mental des enfants Ukrainiens, les aidant à s’intégrer, exprimer leurs émotions et réduire le stress © Magdalena Sikorska

Qu’est-ce qui est nécessaire et combien de temps faudra-t-il pour résoudre correctement les problèmes liés à la guerre auxquels les enfants sont confrontés ?

Le soutien aux enfants passe aussi par le soutien aux parents. Nous devons aider ceux-ci à se stabiliser. L’anxiété, le stress et la pression ne peuvent être surmontés qu’avec une aide régulière. Si les enfants sont entourés d’adultes stables, ils pourront se rétablir plus rapidement. Les enfants ont également besoin de retrouver des choses familières de leur vie d’avant : interactions sociales à l’école, activités extrascolaires, hobbies… pour redevenir des enfants. Mais il est impossible de dire combien de temps le processus de guérison prendra. L’expérience de SOS Villages d’Enfants dans la région de Lougansk – où nous étions une des rares organisations à continuer à aider les enfants et les familles après le déclenchement de la guerre en 2014 – a montré que même quand il n’y avait pas de combats, les enfants ont de nombreux problèmes de développement et de comportement. Les guerres ont des conséquences dévastatrices et les enfants sont ceux qui en souffrent le plus.

Quels sont les besoins des parents ?

Dans les premiers mois de l’invasion, les adultes se sont concentrés sur la survie et la couverture des besoins fondamentaux de leurs enfants. Leur vie est en suspens. Nous devons les aider à surmonter leurs peurs et à se relever. Nous les informons sur les organisations qui offrent l’aide spécifique dont ils ont besoin, les institutions publiques auxquelles ils doivent s’adresser pour obtenir des réponses, les endroits où chercher un logement, un emploi…

Comment s’organise l’aide aux parents ?

A travers les interactions au sein de la communauté. Nous avons de plus en plus d’exemples de collaborations, de cas où les parents interagissent et initient eux-mêmes des actions. C’est formidable. Grâce à notre mentorat, ils ont commencé à organiser des groupes d’entraide par le biais desquels ils soutiennent des personnes déplacées d’autres régions d’Ukraine. Les séances collectives leur donnent l’occasion d’échanger, de partager leurs points de vue et leurs problèmes communs. Cela les aide à comprendre qu’ils ne sont pas seuls. Ensemble, ils cherchent des moyens de surmonter leurs problèmes. C’est très valorisant et cela leur donne de la force.

En Pologne, une collaboratrice SOS à l’écoute d’une bénéficiaire venue d’Ukraine © Katerina Ilievska

Comment faites-vous face à la situation et au stress émotionnel ?

Mes collègues et moi-même sommes encadrés et bénéficions d’interventions individuelles et collectives de la part de professionnels. Nous nous soutenons mutuellement, échangeons, partageons des cas difficiles. Nous avons aussi des activités de gestion du stress qui nous aident à nous déconnecter un peu. Ces activités sont nécessaires pour avoir la force de continuer à aider les enfants et les familles.

En savoir plus sur notre programme en Ukraine

Photo header : © Katerina Ilievska

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