Chaque année, le 1er juin est l’occasion pour la communauté internationale de célébrer les parents et de mettre en avant leur rôle essentiel dans l’éducation des enfants. Chez SOS Villages d’Enfants, nous sommes engagés pour que tout enfant ait sa place dans une famille et y grandisse avec amour, avec respect et en sécurité. Pour se construire, il a besoin d’attention et de soins, de quelqu’un à qui parler et qui l’écoute. Les parents ont la responsabilité d’élever leurs enfants dans un cadre de vie digne et dans un climat serein et stimulant pour qu’ils puissent se développer au mieux et avec tout ce dont ils ont besoin pour pouvoir un jour voler de leurs propres ailes.
A l’occasion de la Journée mondiale des parents, fixée en 2012 par les Nations Unies, nous avons envie de partager avec vous l’histoire de Nyaaba dont la femme est décédée il y a sept ans. Il élève seul ses deux filles et fait tout pour qu’elles puissent avoir un vrai avenir. La petite famille vit dans une région rurale du Ghana et s’en sort tout juste, épaulée par le programme SOS de renforcement des familles de Kumasi. Mais à l’heure du Covid-19 et des restrictions en vigueur dans son pays, Nyaaba est très inquiet car si le Ghana a commencé à se déconfiner, les derniers mois ont été difficiles et les choses ne reviendront pas à la normale de si vite.
Plusieurs mois avant l’apparition du coronavirus, Nyaaba ne se faisait pas de souci pour le futur de ses deux filles. Elles allaient à l’école, portaient des uniformes soignés et avaient toutes les fournitures scolaires nécessaires. Marikah*, 16 ans, et Serwa*, 12 ans, allaient même à l’école en vélo, ce qui leur permettait de réduire leur temps de trajet alors qu’auparavant elles faisaient chaque jour à pied les 8km qui les y menaient. Le programme de renforcement des familles couvrait les dépenses scolaires, leur père s’occupant de leur alimentation et de leurs vêtements.
Nyaaba, qui a aujourd’hui 66 ans, cultive toujours riz et maïs dans sa ferme, ce qui lui permet de nourrir ses enfants. « Je m’efforce d’élever au mieux mes deux filles mais je suis âgé et le coronavirus me donne une autre raison de m’inquiéter. Je ne peux plus aujourd’hui avoir des activités rentables ». Les gros agriculteurs, qui avaient l’habitude d’acheter le surplus de céréales aux petits agriculteurs comme Nyaaba, ont cessé de venir et comme, à cause du confinement, il ne peut plus se rendre à Kumasi où se trouvent les moulins, il a perdu les revenus qui devaient permettre à la famille de tenir le coup pendant la crise. Or la dernière récolte de riz a eu lieu et Nyaaba qui ne peut pas le vendre, s’inquiète beaucoup : « je prie pour que les problèmes disparaissent vite et que je puisse de nouveau transformer mon riz ».
Marikah, sa fille aînée, pense, elle, à l’école où elle a commencé sa septième année quand les écoles ont fermé leurs portes au Ghana. « Je n’aime pas rester à la maison, je ne peux pas suivre les programmes scolaires à la télévision ou les cours en ligne car chez nous on n’a ni télévision, ni ordinateur ». En plus des tâches ménagères, la jeune fille s’occupe donc en révisant les matières dans lesquelles elle a des difficultés et en refaisant ses devoirs. « Le plus difficile, c’est de ne pas voir mes camarades. Parfois je prends ma bicyclette jusqu’à la grande route, juste pour me vider l’esprit » dit-elle avant d’ajouter « mais avec ce coronavirus, j’ai pris conscience de l’importance de l’hygiène ».
Marikah sait que les difficultés liées au coronavirus pourraient bouleverser ses projets d’avenir, elle qui voudrait devenir professeur de maths et être indépendante. Son père est en bonne santé mais elle a compris que le virus touche plus durement les personnes âgées et la perspective qu’il tombe malade, l’effraie. « S’il ne peut plus travailler, il n’y aura personne pour prendre soin de lui et de ma petite sœur. Je devrais alors abandonner l’école et aller travailler dans une ferme pour gagner notre vie ».
*Les prénoms ont été changés pour des raisons de protection.
© photos: Tom Maruko